Premiers mots, premiers pas

VENDREDI 5 JUIN 2009, djom’é 15 khordâd 1388,
de Roscoff à Téhéran, 1er jour :

Ponctualité parfaite : petit-déjeuner, dernier rasage, émotions à la gare.
A Orly sud, l’avion pour Téhéran n’est pas affiché. On en a vu d’autres ! Effectivement, l’avion existe, plus ou moins confidentiel dans une zone reculée. A l’enregistrement, premières palpitations, sueurs froides et inquiétude : les visas doivent être en conformité avec les dates des vols !
« Quand se terminent vos visas, quand revenez-vous ? »
Avant qu’Yvon ne se lance dans des explications fumeuses, « Ah ! Vous avez des visas jusqu’en août, c’est parfait, enregistrons ».
En catimini : jusqu’en août, oui pour la validité, pas pour la durée accordée.
Et il me place près du hublot : « Supprimez les nuages, tant que vous y êtes, svp, merci, merci ».
Dans l’avion, premiers borborygmes en persan avec le steward très prévenant. Pas d’autres français sur ce vol. Une femme sur deux est voilée, c’est à dire avec un carré Hermès négligemment noué.
A l’arrivée un petit coucou à la police, un million de rials pour 100 euros, puis nous escamotons la douane, et à la sortie tombons d’emblée sur l’otoubous pour l’aéroport Mehrâbad : 20 centimes d’euro pour 30 km. On trouve qu’on se débrouille comme des chefs en économisant le transfert de 25 euros proposé par l’agence.


Avec la clim dans la salle d’attente, on caille, et la musique vous prend vite la tête : nuit blanche.


SAMEDI 6 JUIN, Esfahân, 2ème jour :

Arrivée à Esfahân à 6h35 : pas d’otoubous.
Le taxi nous mène en ville à 135 km/h, grillant les feux rouges, en gymkhana entre les groupes de piétons, sans desserrer les dents.
Je suis à l’avant sans desserrer les fesses.
Direct à l’hôtel Sonati choisi de Paris : c’est le grand luxe, dans le cadre d’une riche demeure traditionnelle ! Nous savons que notre avenir proche sera autrement spartiate. 




Nous déambulons dans les rues, passons sur la place de l’Emâm somptueuse, à la recherche de l’office du tourisme (vaine), et de la gare routière que nous atteignons en bus. Nous avons acheté des tickets dans une petite cabine près de la station (istgâh otoubous), que nous donnerons par un ou par deux à l’arrivée, selon la distance. Le ticket vaut 400 rials, soit moins de 4 centimes d’euro. 
 

 
 
Une rangée de sièges sépare le bus en deux : hommes à l’avant, femmes à l’arrière. Les femmes descendent par la porte du milieu, et viennent payer à la porte avant, en déposant leur ticket dans un seau.



Nous déjeunons dans un boui-boui, sur la mezzanine : deux kabâbs et dough en grand pot délicieux. Le dough est un petit lait étendu d’eau glacée, et aromatisé aux herbes, très rafraîchissant. Conversations spontanées dans la rue, même avec une femme que je peux photographier. Un autre étudiant, vétérinaire, est partisan de Moussavi et porte bracelet et collier verts. Nous faisons collection des photos de son candidat, mais il n’est pas bien vu dans le restaurant chic, qui nous est conseillé : nous rangeons notre propagande. La purée d’aubergine baigne dans l’huile et m'écœure, le dessert jaune est visqueux, je saurai plus tard que c'est du fromage blanc sucré au jus de viande et coloré au safran. Yvon adore, nous en reparlerons. PS : Vous avez la recette dans le mail n°25.
Plus loin, Mohamad Reza nous propose d’assister à « l’esport » : ce n’est pas du commerce international, mais un exercice avec massues, chorégraphié et rythmé par un tambour, d’origine très ancienne, pratiqué dans les zourkhânés, gymnases traditionnels. Nous irons y assister à notre prochain passage (chapitre "Dans la zourkhâné"). Aujourd'hui Esfahân n'est qu'une halte sur la route de Kermân : nous résistons à sa séduction, nous savons que nous y reviendrons pour de plus longues escales. Nous nous écroulons dans nos lit.















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