Ils nous consolent

MARDI 7 juillet, 19ème jour de trek :

A 6h30 les vannes d’irrigation s’ouvrent, et l’eau commence à ruisseler. Pour le moment, la tente est encore au sec. Un ouvrier agricole arrive.
Le nuage ne s’est pas envolé malgré la petite brise nocturne. Ce n’est pas une brume, l’air est sec, ni un vent de sable, l’air est calme, c’est bien un nuage de poussière et probablement de pollution.



Nous rebroussons chemin pour repasser sur la rive droite, et traversons des rizières où règne la sérénité de toutes les rizières. L’eau est calme, le vert est tendre, les espaces dessinés, le riz piqué en bouquets, les grenouilles se répondent. Sur les petites digues, nous cheminons, et le temps nous est donné.



Nous escaladons difficilement un piton rocheux, traversons une plantation d’amandiers, où nous nous faisons rabrouer : ici, c’est privé ! Et il nous faudra escalader la grille officielle pour sortir. Nous venions de nulle part. Depuis notre arrivée, nous sommes frappés par la profusion de grilles cadenassées, de volets métalliques, de fenêtres grillagées, de verrous sur le moindre portillon de bois, en ville comme à la campagne.
Des voleurs en Iran ?
Nous mangeons des prunes enfin mûres, à leur tour, après les cerises, les pommes, les abricots et les mûres du mûrier. Les pêches le seront bientôt, et le raisin. Les noix sont loin de l’être. Nous n’aurons vu ni orties, ni ronces, seuls les chardons et les églantiers ont des épines.
Nous changeons ensuite de rive à deux reprises et à chaque pont, selon la topographie et l’inspiration. Au deuxième pont, nous faisons halte sur les galets, pour laver pieds et tête. Nous sommes trop exposés pour faire mieux. Mais plus loin, lors de notre « grande pause », entre 13h et 15h, il y a un petit lit de gravier en berge où je prends un bain complet au chant du muezzin. Les moustiques attaquent ! Entre rizière et rivière, ils sont chez eux, et nous ripostons avec le répulsif. Entre rizière et rivière, les berges sont propres.



Ici, le courant reste puissant, vert tirant sur le gris, un peu laiteux avec des remous, et les hampes rose vif des épilobes égayent sa pâleur. La rivière a bien trente mètres de large, très sinueuse entre des alternances de hautes parois rocheuses et des peupleraies ou des rizières.



Le canal d’irrigation continue à la longer sur les deux berges. Nous recueillons encore une bouteille d’eau qui paraît pure et a bon goût.



Nous reprenons la marche par une escalade sur un sentier muletier de gravier dériboulant, avec le moral dans les chaussettes : le nuage est lourd, sans subtilité, salit le paysage, colle à la peau, asphyxie les poumons, et alanguit l’âme. Et nous marchons vers les citadins, nous qui aimions les bergers, les paysans et les pêcheurs.



Mais voici un père et son fils à leurs travaux d’irrigation, qui nous proposent le thé avec le sourire (cinq verres et une thermos !), qui nous parlent de leurs abricots et qui nous les offrent, qui nous indiquent le chemin des piétons, et tout va bien, et l’air est plus léger. Dans le village suivant, nous trouvons tout ce qu’il nous faut : pain, thon, gâteaux pour demain matin, poires en boîte, jus de fruits, bière au citron. Nous serons rassasiés, reste à dénicher un coin pour la tente. Nous passons en équilibristes sur un tronc qui enjambe le canal, et nous voilà à l’abri dans un espace bien protégé, sous les peupliers qui bordent la rivière. Le sol est plat et dégagé, la tente est bien tendue, le dîner est avalé, bonsoir !

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